Activités de la Chaire UNESCO

JNP 2025: Euphrasie Yao exhorte les Ivoiriens à devenir des sentinelles vigilantes et vivantes - Publiée le 17/11/2025

  
  

En ce 15 novembre, la Côte d’Ivoire s’est réveillée sous un ciel lourd de symboles. La Journée Nationale de la Paix n’a rien d’un rituel figé dans le calendrier. Elle revient chaque année sonder nos fragilités, éprouver notre capacité à tenir ensemble, mesurer ce que nous avons appris des blessures anciennes. Partout, des prières ont été dites, des terrains poussiéreux se sont remplis pour des matchs de football improvisés, des communautés se sont retrouvées autour de gestes simples qui en disent long : la paix ne se décrète pas, elle se cultive.


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Sur les réseaux sociaux comme dans les quartiers, une phrase a circulé : la paix peut être fragile, mais elle devient forte quand nous choisissons de la protéger. Elle résonne avec une intensité particulière au moment où le pays entre dans une nouvelle séquence politique, où les passions s’aiguisent parfois plus vite que les consciences.
Dans ce paysage où chacun tente d’apprivoiser ce mot souvent galvaudé, une figure revient régulièrement, discrète mais constante. Euphrasie Kouassi Yao, ancienne ministre et titulaire de la Chaire UNESCO Eau, Femmes et Pouvoir de Décisions, a fait de la paix un engagement presque organique. Il y a plus de quinze ans, elle portait le premier Plan d’Action National en Afrique issu de la Résolution 1325 du Conseil de Sécurité des Nations Unies. À l’époque, peu y croyaient vraiment. Aujourd’hui encore, beaucoup oublient que ce texte a ouvert une brèche. Il a replacé les femmes au cœur du processus de paix, non comme une concession mais comme un principe politique incontournable.


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La trajectoire ivoirienne depuis lors en est une preuve vivante. Le programme CREA-PAIX, qu’elle pilote depuis la Chaire UNESCO, prolonge cet héritage. Ici, pas de discours creux. Ce sont des webinaires gratuits qui réunissent des milliers de participants. Des formations certifiantes qui préparent des femmes à devenir médiatrices dans leur propre communauté. Des « actes pour la paix » posés quotidiennement par des citoyens ordinaires. Et cette idée obstinée que la paix appartient à ceux qui la fabriquent, pas à ceux qui en parlent.
Aujourd’hui encore, dans certains villages de l’intérieur comme dans les quartiers d’Abobo, d´Adjamé ou à San Pedro, CREA-PAIX continue de s’inviter dans les gestes les plus ordinaires. Une rencontre sportive organisée pour freiner une rivalité dangereuse. Une séance de prière collective pour apaiser un climat tendu. Une discussion de proximité pour prévenir un malentendu avant qu’il ne devienne une blessure. Une médiation nocturne menée par des femmes dont les noms n’apparaîtront jamais dans les communiqués officiels.


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Il faut le reconnaître : si la Côte d’Ivoire tient debout, c’est aussi grâce à celles et ceux qui travaillent dans l’ombre. Grâce aux « sentinelles vivantes de la paix » comme les appelle Euphrasie Yao. Grâce à des communautés qui refusent l’engrenage de la violence que le pays a trop bien connu.
En cette Journée Nationale de la Paix, la tentation est grande de se satisfaire de messages officiels ou de photos de circonstance. Ce serait une erreur. La paix ivoirienne n’est jamais définitive. Elle se renforce à chaque fois que l’on choisit l’écoute plutôt que la colère, l’entente plutôt que la fissure. Et c’est sans doute pour cela que cette journée du 15 novembre résonne plus que d’autres : elle rappelle que la paix est un choix, un geste collectif, un muscle qu’il faut entraîner.

La Côte d’Ivoire continue d’avancer. Et derrière ce mouvement, il y a une idée simple, portée depuis des années par une pionnière : la paix n’est pas un décor, c’est une construction. Aujourd’hui, plus qu’hier, chacun est invité à y poser sa pierre.

Alpha Mourinho